lundi 1 avril 2013

L'écriture au bout des doigts

Jamais tu n'aurais cru que tu lirais avec plaisir un texte sur la guerre. La première qui plus est. Et pourtant cet après-midi, tu as lu cette guerre-là avec bonheur. 
Tout ça pour un type. Un type que tu ne connais même pas, mais qui te caresse de sa plume depuis plusieurs années déjà. 
Cette histoire n'augurait rien de bon, puisque ses premiers mots pour toi avaient été Je m'en vais, mais tu l'as suivi, telle une ombre avide. Il a traîné avec Des grandes blondes, t'a fait Courir et Un an plus tard t'a présenté Ravel, entre autres pages.
Parmi celles d'aujourd'hui, tu lis ceci:
"Ne fût-ce qu'à cause de ces deux-là, le pou, le rat, obstinés et précis, organisés, habités d'un seul but comme des monosyllabes, l'un et l'autre n'ayant d'autre objectif que ronger votre chair ou pomper votre sang, de vous exterminer chacun à sa manière - sans parler de l'ennemi d'en face, différemment guidé par le même but -, il y avait souvent de quoi vous donner envie de foutre le camp."
Si tu pouvais, tu le lirais les yeux fermés.

"Se laissant plutôt aller à surveiller les signes du printemps - c'est toujours émouvant à observer, le printemps, même quand on commence à connaître le système, c'est une bonne façon de se changer les idées -, Arcenel s'est montré tout aussi  attentif au silence, silence à peine teinté par les grondements du front jamais si loin, et qui ce matin d'ailleurs tendaient à s'atténuer."
De cette si belle façon il te fait traverser cette infamie du début du vingtième siècle.

14, Jean Echenoz, éditions de Minuit 

2 commentaires:

  1. Nous avons la même ferveur pour les écrits d'Ehenoz ! j'ai également commencé avec "je m'en vais"

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  2. Jamais je n'aurais cru...
    Cela dit moi non plus, je n'ai jamais lu sur la première guerre.
    De quoi ne dire jamais "jamais"

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