mardi 1 décembre 2015

Andy ?

Toi, tu crois que tout le monde sait qui est Andy Warhol. 

Ah le peintre ?
Si si si, c'est le type qui chantait avec David Bowie, euh non avec Daho ?
Pas du tout c'était un ouvrier de chez Heinz qui peignait les boîtes de sauce tomate...
Vi vi vi vi vi. 
Bon on reprend tout. 

Un opus de la revue Dada consacré à cet artiste de génie vient de paraître. Une manière extrêmement bien construite et ludique de rappeler à tous qui il est. 

Dada c'est exactement le type de document que tu apprécies : toujours très beau, mis en page et policé à l'image de l'artiste présenté. S'agissant d'une revue, le format n'excède quasi jamais la cinquantaine de pages. L'artiste et son oeuvre sont abordés de façon chronologique à travers des doubles pages à thème très judicieusement illustrées (cette fois-ci par exemple, l'une est consacrée à la jeunesse de Warhol, une autre à la Factory). Les articles sont relativement courts et aérés offrant une lecture accessible au plus grand nombre.


Un ABCD'Art ponctue les articles, ingénieuse idée permettant de visualiser l'ensemble des aspects à retenir.



Une technique artistique est dévoilée dans chaque numéro, transformant chaque lecteur de bonne volonté en créateur génial, forcément génial.


La dernière partie de chaque numéro bien nommée "aRtualités" est consacrée à l'actualité artistique plastique.

Tu veux que je te dise ? Dada, c'est mon dada

Pop remerciements à Babelio et aux Editions Arola ;-)

Andy Warhol, Collectif d'auteurs, Editions Arola, Collection Dada




mardi 24 novembre 2015

Le dernier jeudi

Un jeudi comme tant d'autres, tu as empoché ta longue liste d'ouvrages à acheter. Tu jubilais à l'idée des yeux pétillants qui découvriraient bientôt de nouveaux mangas, des romans tous neufs, ce beau livre sur les légendes noires et celui sur l'Afrique d'aujourd'hui. Comme à chaque fois tu as fouiné pendant que le libraire listait ce qu'il devrait commander. Tu as hésité parce que quand même c'était pas tout à fait Noël, tu n'as plus hésité parce que tu rêvais de l'offrir et que Noël au fond tu t'en moques totalement. Tu as pris le sac de livres que le libraire te tendait et tu lui as donné celui que tu avais entre les mains en soulignant (comme presque toutes les fois) que celui-là il était pour toi. 
Tu as dit en arrivant à la maison "Tiens, je nous offre un Océan d'amour".
Tu ne te doutais pas que jamais tu n'oublierais la date et l'heure à laquelle tu l'avais lu. Il était venu à ta rencontre le 12 novembre. Tu étais en train de le lire le 13 en début de soirée.































Un océan d'amour, Lupano & Panaccione, éditions Delcourt

mardi 17 novembre 2015

Ce qui me tue, ou pas

Millénium, tome 4 : Ce qui ne me tue pas par David LagercrantzTu savais que par l'entremise de Babelio, tu allais recevoir le tome 4. Alors tu as relu La reine dans le palais des courants d'air, le dernier tome écrit par Stieg Larson. Tu voulais pouvoir faire un lien entre les deux auteurs. 
L'attendu est arrivé dans ta boîte. Enfin. Une enveloppe ultra-plate. Il t'avait pourtant semblé que le pavé valait ses prédécesseurs, en poids. Tu n'avais pas noté qu'il s'agissait de la version audio. Tu as écouté, mais tu ne retrouvais pas l'univers imaginé par Stieg Larsson. Tu t'es alors tournée vers le pavé imprimé, confiante, persuadée que tu étais désarçonnée parce que tes oreilles ne savaient pas bien lire. Un peu moins de cinq cents pages dévorées avidement quasiment d'une traite...pour les trois premiers tomes. Cette fois-ci, tu es allée jusqu'au bout parce que tu vas toujours jusqu'au bout. Tu n'as abandonné que deux ou trois livres depuis que tu as découvert la lecture. Tu n'as pas retrouvé l'aura des personnages de Stieg Larsson. Tu as passé quelques heures avec des inconnus alors que tu pensais retrouver de vieilles connaissances. Tu n'as pas reconnu les rues de Stockholm que tu avais arpentées dans les tomes précédents. 
Tu as lu un bon polar, tu as aimé l'intrigue et ses péripéties, tu t'es laissée prendre au jeu, mais tu n'as pas lu le tome 4 de Millénium.    
Remerciements à Audiolib et Babelio.

Millénium 4, Ce qui ne me tue pas, David Lagercrantz, éditions Actes Sud, traduction Hege Roel-Rousson

mardi 29 septembre 2015

Toutes une Reine

Un drôle de livre m'est parvenu. Rouge, très fin, quatre-vingt pages environs, écrit comme une chanson. Un titre étrange aussi: Le Jour où je serai Reine. Une histoire de maman qui s'envole, une ritournelle de la vie, le chant du cerveau qui part en confiture. Un livre qui va bien avec l'automne. 

Un livre qui rappelle que la vie ne tient qu'au fil du cœur avec un grand C. Comme le cerveau et le cul. Une tresse de ces trois C : la liane qui te tient debout.

Un livre qui rappelle aussi l'importance des éditions indépendantes. Merci mes Thot.




Le Jour où je serai Reine, Georgette Bonnier, Editions Thot

dimanche 13 septembre 2015

Carrère, l'art et la manière de l'implicite

Il t'a fallu vingt ans pour lire ce livre. Il t'en faudra beaucoup plus pour oublier ce que tu as lu. Ce que tu n'as pas lu, pour être plus juste. Il faut savoir que tout l'art d'Emmanuel Carrère réside dans cette virtuosité particulière : ne pas écrire une seule ligne de tout ce que tu retiendras de cette lecture. 





La Classe de neige, Emmanuel Carrère, Editions P.O.L

mardi 8 septembre 2015

Lire un roman jeunesse fantasy et y prendre du plaisir

Cet été (oui il y a eu l'été) est arrivé dans ma vache de boîte à lettres (oui ma boîte a un air vache) une enveloppe toute déchiquetée, comme si le livre qu'elle contenait avait essayé de s'en échapper (oui c'est possible). Je l'ai immédiatement lu, avant que l'idée de fuir ne le reprenne. C'était le jour de l'été où il faisait beau et chaud. J'avais même dû installer mon joli transat à l'ombre. Je n'ai pas vu passer le soleil, j'ai été happée par un texte ensorcelant. Un texte où se mêlent réalité et fantastique d'une façon si naturelle que d'aucuns pourraient s'imaginer un livre tentant de s'échapper d'une enveloppe...Je l'ai rangé bien à l'abri avant de le déposer sur l'étagère des nouveautés, attendant de voir comment il va s'y prendre pour attirer les élèves. Il est des livres dont les pouvoirs outrepassent celui de leur auteur et du lecteur : Les Portes de L'Oubli appartient à cette catégorie particulière.

Merci aux éditions Thot de cet envoi qui a dû attendre la rentrée pour que je parle de lui

Aux Portes de L'Oubli, Barbara Bret-Morel, éditions Thot

vendredi 14 août 2015

Chère Alice,

Je viens de terminer ta tordante bande dessinée. J'ai ri, souri, hoché la tête et ponctué pas mal de pages d'un joyeux "comme nous". Bon, nous on ne lui avait pas donné de petit nom (et on n'aurait jamais choisi Jean-Pierre, mais ça c'est une autre histoire), et c'était la première fois (et si possible, la dernière) qu'on cohabitait avec un crabe, mais comme toi, malgré la terreur, on a bien ri. Je dis nous, parce qu'on s'y est mis à deux pour lui faire sa fête. Comme toi, on a trouvé que les autres ne le regardaient pas bien en face et auraient pu être plus souriants. Faut pas leur en vouloir, ils ont fait de leur mieux. Comme toi, on a appris plein de mots qu'on ne connaissait pas, mais bizarrement on ne trouvait pas ça fabuleux. Comme toi, le prélèvement dans la hanche est un souvenir qui s'accompagne de nombreuses grossièretés, mais on est devenu des pros du décryptage des résultats d'analyses (on en tire ce qu'on peut). Comme toi, on a eu un moral d'enfer pendant les mois qu'on a passé à lui ratatiner la carapace (entre nous on disait plutôt lui niquer sa race, mais ici je suis un peu plus soft) et on s'est bizarrement senti abandonné quand il a disparu. Soulagés, mais un retour à la vie réelle pas si simple. Comme on ne savait pas dessiner, on t'a laissé faire, et c'est très bien comme ça !

Tu l'auras compris, la BD d'Alice Baguet est un ouvrage autobiographique qui traite d'une affection dont elle a été victime. Dans la lignée de Leslie Plée, le dessin et le texte sont drôles et dotés d'un réalisme enthousiasmant. Alice Baguet parvient à donner de la légèreté à ce sujet terrifiant. 


Merci à Alice Baguet,  Babelio et les Editions Vraoum pour cette bouffé d'air (qui sentait un peu les raviolis, mais bon).

tous les livres sur Babelio.com


dimanche 2 août 2015

Cacher son je


Parfois tu avances et tu découvres au détour d'un virage ou d'une ruelle ce à quoi tu ne t'attendais pas. Un paysage, un objet, un personnage, un décor qui te prend là telle que tu es. Il t’époustoufle ou t'épouvante, peu importe, il te surprend. Il puise dans des ressources inhabituelles. Il te confronte. Il a cela de merveilleux : il sort de l'ordinaire. Il t'oblige. 
Il est des mots qui ont cette force. Tu es de celles qui puisent au hasard des livres. Tu ne sais que rarement ce que recèle celui que tu choisis. 
Mercredi dernier, tu as pris sous ton aile un texte de Kéthévane Davrichéwy. Tu te souviens avoir lu un échange entre elle et Alex Beaupain dans une revue. Cela t'avait plu. Tu ne savais pas qu'elle tutoyait le succès. Tu viens de découvrir un auteur. Les Séparées  est un texte qui t'a beaucoup rappelé La Mauvaise Rencontre de Philippe Grimbert. L'atmosphère en est proche, la réflexion autour de l'amitié et ses travers aussi. Kéthévane signe un ouvrage court à l'écriture précise et te promène dans des méandres qu'il n'est pas aisé de regarder en face.

Les Séparées, Kéthévane Davrichewy, Editions 10/18

mardi 21 juillet 2015

Nouveau monde

En cette année particulière où le dessin de presse à sauté à la face du monde, il était le fil conducteur que tu avais choisi pour un module en classe de seconde. Depuis septembre, tu ramais, les élèves nageaientbarbotaient, se noyaient entre dessins de presse et Bd de reportage. Tu leur ouvrais les portes d'un monde qui leur était inconnu et opaque. Ils ne tissaient aucuns liens entre l'actualité et ce type de dessins. De rares doigts s'étaient levés pour citer, en les estropiant, les noms des dessinateurs de Ouest-France et du Télégramme, pour le reste nada. Tu n'as pas lâché l'affaire. Tu leur as fait lire des entretiens entre Numa Sadoul et des dessinateurs. En ronchonnant pas mal, ils ont tourné les pages des Bd de Sacco, Chappatte et d'autres, visionné des petits reportages, jusqu'aux vacances de Noël. En janvier, tu allais pouvoir démarrer l'analyse du dessin de presse en tant que tel.

©Yacine - Le Ravi
Tu as eu cours avec eux le 8 janvier. Tout avait changé. Ils voulaient tout savoir. Ils avaient tous un avis. Passé le seuil de l'attrait du morbide, les débats ont été houleux, laborieux parfois : un manque crasse de culture nuit forcément à la compréhension des événements et de leur transcription médiatique. Ils ont compris que tu leur avais tendu les clés des portes d'un monde qui leur ouvrait l'esprit. Ils se sont intéressés de plus près à la réflexion que tu proposais. A leur tour, ils ont pris un crayon. Tout n'était pas bon, mais tu as pu afficher quelques dessins convaincants. Après avoir appris à décrypter les dessins d'auteurs renommés, ils ont analysé les dessins les plus probants de chaque classe. Il t'a semblé qu'ils étaient fiers de faire partie de ce monde nouveau pour eux.

Il faut être lucide, personne n'est venu relire une Bd de reportage (faut dire que les auteurs de celles du CDI ne sont pas morts dans de tragiques circonstances...), personne n'est venu reprendre non plus le très bon livre d'entretiens de Numa Sadoul. On y passe pourtant d'agréables moments en compagnie de Cabu, Charb, Kroll, Luz, Pétillon, Siné, Willem et Wolinski. Numa Sadoul avait mené ces échanges entre 2006 et 2009. Parus en 2014, ils demeurent en phase avec l'actualité.

Dessinateurs de Presse, Entretiens avec Cabu, Charb, Kroll, Luz, Pétillon, Siné, Willem et Wolinski, Numa Sadoul, Editions Glénat

jeudi 16 juillet 2015

La BD du futur

Le Tome 2 est digéré depuis belle lurette, et je ne t'ai pas encore parlé du Tome 1. 
Peu importe, tu liras les deux, et ceux qui suivront. Tu liras, parce que tu as envie de comprendre les différences. Tu liras parce que tu veux donner un sens à ce titre. Tu liras parce que tu as envie de savoir pourquoi certaines pages sont bleues, d'autres jaunes, roses, rouges ou vertes. Tu liras parce que tu aimes le travail de Riad Sattouf.
Tu liras parce que tu auras entre les mains une des clés.  



L'Arabe du Futur, Riad Sattouf, Editions Allary

jeudi 9 juillet 2015

Chute libre

Il t'arrive de te sentir totalement démunie devant un livre. C'est assez rare. Très enthousiaste, tu avais coché Conduire le changement en bibliothèque dans la dernière liste de Masse Critique proposée par Babelio. Tu pensais dévorer littéralement ce type d'ouvrage et y trouver quantité de pistes intéressantes pour ton travail. Te voilà totalement hermétique à ce que tu lis.
De nature laborieuse, tu n'es pas du genre à te laisser pilonner par un livre, alors tu l'as repris plusieurs fois: dans l'ordre, dans le désordre (possible puisqu'il s'agit d'un ouvrage technique chapitré), en t'appliquant, en lisant en diagonale...fiasco intégral.
Tu te retrouves dans une posture gênante, en retard pour chroniquer un livre dont tu n'as rien à dire...

Remerciements et excuses à Babelio et aux éditions de l'enssib

Conduire le changement en bibliothèque, Christophe Pérales, éditions de l'enssib



samedi 4 juillet 2015

La vie est aussi une bd

Si tu penses que tu n'aimes que la littérature, ose un ouvrage d'Etienne Davodeau. 
Si tu crois que tu n'aimes pas la bande dessinée, ouvre un album d'Etienne Davodeau. 

Je ne te dirai rien de plus. Laisse-toi dessiner la vie.




Le Constat, Etienne Davodeau, Editions Dargaud

mardi 2 juin 2015

T'ai-je déjà dit ma rencontre avec un ange?

Te souviens-tu de ce jour de juillet dernier au cours duquel je t'avais présenté Fay ? Fay Renoir, la demoiselle elliptique, ça te revient ? La jolie jeune fille, le handicap, le fauteuil, l'épilepsie, tu te souviens ? Et les dessins, tu ne les as pas oubliés?

Je ne t'avais pas tout dit. Elle était amoureuse. De son ange gardien. Comment ? De l'eau de rose ? Tu n'y es pas du tout.

(Et tu sais très bien que l'eau de rose, ce n'est pas ma tasse de thé, sauf à pâtisser, mais c'est une autre histoire...)

Dans ses absences provoquées par l'épilepsie, Fay vit sur ses deux jambes et retrouve l'usage de la parole. Ce monde-là lui offre des émotions différentes. Elle s'y aventure avec une sorte de plaisir addictif, comme on se précipiterait dans un train fantôme. C'est angoissant mais c'est grisant. 

Il est possible de lire ce second volume comme un pur roman fantasy. Tu peux aussi le lire d'une façon plus philosophique, au regard de l'allégorie de la guérison, sur laquelle s'appuie l'histoire. 

Merci aux éditions Thot :-)


Fay Renoir, la face sombre des anges, Marlène Chombart-Lemoine, éditions Thot

samedi 2 mai 2015

Plume

Des ombres et des sons, des respirations et des mouvements...que de souvenirs et de sensations retrouvées.
Le Cirque Plume a bercé mes années lycée et fac, son chapiteau presque sous mes fenêtres, ses notes de musique accompagnant mes errances de jeune adulte. Le retrouver sur scène il y a quelques jours a été la source d'une émotion particulière. "Sourieuse", ai-je envie d'écrire. 
Un bonheur indescriptible, une poésie qui offre du rire et des larmes. 





Ressassant des images du spectacle et d'autres plus anciennes, je cueille des passages du bel Abécédaire du Cirque Plume réalisé par Bernard Kudlak, un des fondateurs de cette belle aventure. Des bribes d'histoires, des croquis, des photographies, de la poésie, des esquisses de spectacle : une malle aux trésors.

Abécédaire du Cirque Plume, Bernard Kudlak

mardi 14 avril 2015

Impossible ballade

Qu'est-ce qui m'échappe dans les livres de Murakami?
Quel est ce mystère qui me donne envie de lire, qui me pousse à chercher ce qui fascine tant de lecteurs et qui me traverse sans m'effleurer ?


La ballade de l'impossible, Haruki Murakami, Editions 10/18, traduction Rosa-Marie Makino-Fayolles

mardi 7 avril 2015

Le nuage et l'Original

A Brest en Bulles, le festival de bande dessinée de Brest, tu es restée plantée devant des dessins. Tu ne t'attendais pas à ce frisson-là. Tu sentais bien que depuis janvier, tu ne te débarrassais pas de ce nuage sombre, un peu collant. Tu ne savais pas que quelques traits de crayon t'époustoufrissonneraient à ce point. Les uns avançaient, et toi tu bloquais. Tu bloquais devant les dessins originaux et les photographies non officielles de l'expo hommage à Charlie. 

Le nuage s'est éclairci. Comme si la force de ces dessins l'avait désintégré. Tu relis, avec plaisir et voracité. 

Tu as acheté un recueil de dessins, hommage lui aussi. Très beau, très fort. Le comble pour un recueil de dessins, il commence par un texte : 
"Quand avec Choron, "mon frère", nous avons pris le risque de lancer Hara Kiri, puis Charlie Hebdo, nous n'avions pas l'intention de faire de l'humour - "faire de l'humour" ! Quelle dérision ! - mais bien de rire, de rire et de faire rire sans entraves, sans tabous et sans prétendre réformer les mœurs ou la morale.
Rien n'est sacré. Pas même le bon goût. Pas même le militant. Surtout pas le croyant. Ne croyant à rien de transcendant, nous n'avions rien à respecter. L'humour est un coup de poing dans la gueule. Cette phrase que je revendique fut notre profession de foi.
Rien n'est tabou, rien n'est sacré. Le partisan rit de son adversaire, le croyant rit du non-croyant d'en face. Ne croyant en rien, n'adhérent à rien, nous riions de tout et de tous. Le rire est brutal, provocateur, imprévisible, injuste, sans pitié. Il ne venge, ni ne punit, ni ne juge. Il s'en fout."
Extrait d'un texte de Cavanna, datant de 2012
  La BD est Charlie, Collectif d'auteurs, multi-éditeur

samedi 4 avril 2015

Partage sans concession

(Re)lire Matin Brun. 
L'évidente nécessité.

"Ce matin, Radio brune a confirmé la nouvelle. Charlie fait sûrement partie des cinq cents personnes qui ont été arrêtées. Ce n'est pas parce qu'on aurait récemment acheté un animal brun qu'on aurait changé de mentalité, ils ont dit.
"Avoir eu un chien ou un chat non conforme, à quelque époque que ce soit, est un délit."
Le speaker a même ajouté:
" Injure à l'Etat national."
Et j'ai bien noté la suite. Même si on n'a pas eu personnellement un chien ou un chat non conforme, mais que quelqu'un de sa famille, un père, un frère, une cousine par exemple, en a possédé un, ne serait-ce qu'une fois dans sa vie, on risque soi-même de graves ennuis." 

J'avais oublié que l'ami s'appelait Charlie. Je n'avais pas oublié le reste du texte. Je n'avais pas oublié le frisson glacial que procure cette lecture.
N'oublions pas de le glisser sous tous les yeux qu'on croise.
Une nouvelle édition illustrée par C215 est désormais disponible.
Inoubliable.
© C215 / The Chemistry Magazine

 Matin Brun, Franck Pavloff, Editions Albin Michel, illustrations C215

jeudi 2 avril 2015

J'ai bien connu ma mère

Parmi tes blogocop's, il y a des écriveuses. Plusieurs. La plupart noircissent les écrans, savent que quelques paires d'yeux lisent, mais on en reste là. Et puis il y a les courageuses, celles qui osent, et impriment ; les laborieuses, qui travaillent un texte de plusieurs dizaines de pages. Des centaines parfois. 
Par un pur hasard, le livre de L. et celui de C. ont un personnage principal commun: leur mère. Des histoires différentes bercées par les mots de ces filles aimantes. 
Le livre de Claude-Sophie est une fiction dont on sent bien la part de vérité s'emmêlant. Tu le lis d'une traite, emportée par un secret que tu espères décrypter avant tout le monde. Tu te laisses emporter par une vague amoureuse, empreinte d'une certaine nostalgie souriante. Celle que tu aimes. Celle qui te rappelle ta mère.

Comme L. , Claude-Sophie peint. Tu avais reçu en plein cœur les peintures qu'elles t'envoyaient quand tu en avais bien besoin.


J'ai bien connu ta mère, Claude-Sophie Gibrat, Editions du Net

samedi 28 mars 2015

Tu n'as jamais lu "Le Vieil Homme et La Mer"

Tu es depuis toujours de celles qui n'ont pas envie de lire les livres que tout le monde lit. C'est comme ça. Au collège et au lycée, tu lisais en diagonale les "z'obligatoires", et pendant que tes camarades de classe lisaient des livres de collégiens, tu lisais Boris Vian; aujourd'hui tu lis du roman jeunesse quand d'autres se passionnent (aïe) pour Marc Lévy (un pari stupide, et ce nom-là se retrouve écrit ici...).
Tu as ainsi quelques lacunes que tu combles en empruntant des sentiers peu fréquentés. 
Te voilà donc plongée dans la mer de ce vieil homme. Tu as choisi une adaptation dessinée. Parce que le dessin t'a beaucoup plus. Parce que la première page t'a bouleversée.























Te voilà dérivant sur une barque à la chasse à l'espadon. Chasse oui. Parce qu'avant l'hameçonnage, il y a la traque. Ensuite il y a l'errance.
C'est sûr dès lundi tu t'attaques au roman d'Hemingway.

Le Vieil Homme et La Mer, Thierry Murat, Editions Futuropolis

mardi 17 mars 2015

Modiano et moi

Modiano est entré dans ta vie il y a peu. Deux ans disons. Tu le connaissais, oui. Tu aimais écouter Frédéric Bonnaud en parler avec des grelots dans la voix. Parce que Bonnaud, il l'admire depuis le début, Modiano. Tu te souviens de cette fin d'après-midi de la dernière émission de ce Bonnaud-là, viré de France Inter parce qu'il y distillait un niveau de culture trop élevé (oui oui, c'était le motif officiel), tu te souviens donc que tu t'étais garée face à la mer, en rentrant du travail, pour entendre son au revoir et pleurer avec lui. Tu te souviens de la musique aussi. La BO des Deux Anglaises et le Continent. Il pleurait Frédéric Bonnaud. Toi aussi. Et encore, il parlait de Modiano.

Il fallait que tu lises. A l'évidence. Cela a pris du temps, et un dimanche de pluie, dans les cartons d'une bibliothèque qui faisait le vide, Dans le café de la jeunesse perdue t'a tendu les bras. Embarqué.

Tu lis. Enfin. Tu te laisses porter par ce texte. Il ne passe rien. Il se passe tout. La magie Modiano opère. Tu t'en délectes, tu savoures. Les mots justes. L'émotion simple et si pénible. L'entière contradiction de l'être. Tu aimes. Tu ne lis que celui-là. Il te ramène à des sensations connues, lointaines, tu connais les hommes et les femmes de ce livre. Tu reconnais leurs âmes.

Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier paraît quelques mois plus tard. Tu sais qu'il est pour toi. Tu le laisses fondre. Du gingembre confit: tout doux au commencement et puis brûlant.

Tu sais désormais que cette écriture-là  t'es devenue indispensable. Parce que. 

mardi 10 mars 2015

Recherche légèreté désespérément

© Editions Les Échappés

Tu ne sais peut-être pas que depuis le 7 janvier mon rapport à la lecture a changé. Mon rapport au monde a changé. 
En fait, je ne comprends toujours pas bien pourquoi tout cela me perturbe autant. 
Je me remets à lire, très peu, mais un peu. J'ai du mal à m'attacher aux mots. Ils étaient ma pommade, ils me glissent dessus sans presque plus me toucher. 
Alors je lis des textes courts, et beaucoup de documentaires utiles à mon travail, histoire de réapprivoiser mon monde des livres.
Je lis des textes drôles, mais ce qui me faisait rire me rend triste.

Même les fatwas de Charb. Zut alors.

Petit traité d'intolérance, Charb, Editions Librio, collection Idées

jeudi 12 février 2015

Dansez mots dessins


L'écriture de Laure coule au milieu des maux. De source. Elle puise dans ses douleurs personnelles une profondeur rare. Elle sait dessiner le tragique et te le faire apprivoiser. Elle sait. Elle a l'intelligence des mots et celle du trait. Ici elle t'emmène dans les méandres de la fin de vie en vrille, parfois elle te promène d'arbre en ruisseau, elle te tire les larmes quand elle te raconte un oiseau emprisonné. 
Elle est danseuse de vie. 


Le dément voyage, Laure Payen-Amaudry, non-édité à ce jour

samedi 10 janvier 2015

"Ils sont votre épouvante et vous êtes leur crainte", Victor Hugo



Tristesse. Épouvante. Incrédulité. Indignation.
Tu as peut-être été élevé aux animateurs télé, ou aux albums pour enfants, ou aux histoires contées, que sais-je encore.
Ou comme moi, as-tu été nourri au "Petit Ménestrel" et aux dessinateurs de presse. Dans la maison de mon enfance pas de télévision, mais la radio, la presse et des livres. En abondance.
J'ai des souvenirs très précis du Canard Enchaîné, de Hara-Kiri, du Hérisson même, avant qu'il ne tourne un peu mal. J'avais le droit de regarder, j'étais fière de jouer à la grande qui lit le journal, j'avais les explications que je demandais. J'ai des souvenirs de Droit de Réponse. Pas de poste de télévision à la maison, mais chez mes grands-parents où on passait les week-ends et où j'avais le droit de regarder avec les grands cette émission qui me faisait un peu peur parce que les participants s'engueulaient souvent mais j'adorais ne pas comprendre et attendre que ma mère m'explique ce qui s'y était dit. 
Je n'ai jamais cessé de lire la presse, satirique tout particulièrement. A l'université, j'ai appris l'histoire des médias, de la presse, de sa liberté et de la censure.  Ma conscience politique et socioculturelle s'est forgée page après page, dessin après dessin.
J'ai des souvenirs de Cabu à Récré A2 chez les copines le mercredi. Elles attendaient les dessins animés, et moi j'étais scotchée par ce type rigolo qui dessinait l'émission.
Et le type rigolo s'est fait exécuté. Et ce n'est pas du cinéma. 
Charlie c'était pas Récré A2, mais on imagine bien l'ambiance de récréation qui sans aucun doute y régnait. La potacherie, la rigolade, les grandes discussions, les bousculades intellectuelles, les grosses disputes, les retrouvailles. La  L I B E R T E .
Bien que je n'y crois pas, j'ai envie d'imaginer que leur paradis est une grande cour dans laquelle ils resteront tous d'éternels grands enfants.

lundi 5 janvier 2015

Sans voix

Tous les jours des mots résonnent à ton oreille: "clandestin", "travailleur sans-papier", "esclavage", "passeur", "vendeur de sommeil". 
Chaque jour tu regrettes que cela se résume à une énumération de faits d'actualités sans que personne ne prenne véritablement la mesure de cette réalité malheureuse et terrifiante.
Tu ouvres un livre. 
Tu le refermes après l'avoir avalé d'une traite. Tu pleures, tu voudrais le lire à voix haute afin qu'il heurte toutes les oreilles du monde.
Une centaine de pages d'une poésie déchirante, la couleur de miel du désert, la chaleur de cette vie-là, et puis la noirceur du passage dans l'autre monde, celui d'ici, sans concession.

Editions Thot, je vous remercie de ce précieux cadeau littéraire et lui souhaite une vie de livre exemplaire.

Miel et Charbon, Thierry Filou, Editions Thot
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